Le droit d’information et d’accès aux documents et pièces de l’associé/actionnaire

Le droit d’accès aux documents sociaux est une question répandue en pratique, souvent posée par des associés ou actionnaires désireux de comprendre la gestion de leur société, d’anticiper une action en responsabilité ou de préparer un contentieux.

Car sans preuve, pas de procédure efficace : l’accès à l’information constitue souvent le préalable nécessaire pour agir ou se défendre. Pourtant, ce droit reste encadré, limité, et dépend largement de la forme sociale de l’entreprise concernée.

Le droit à l’information peut être :

  • Permanent : à tout moment l’associé/actionnaire accède à l’information
  • Encadré : le droit ne peut être exercé qu’en vue de l’assemblée générale

Ce droit des associés peut être appelé ainsi : Droit d’information des associés sur les affaires sociales, droit d’accès

Société civile immobilière

Le droit d’accès dans les SCI est TRES LARGE comparé à celui des sociétés commerciales. Cela se justifie par le fait que les associés sont indéfiniment responsables et que l’intuitu personae y est très fort, supposant une très bonne entente entre tous les associés.

Droit permanent de consultation des documents sociaux par les associés

    Outre le droit d’information annuelle à l’occasion de l’approbation des comptes, les associés peuvent exiger des informations sur les affaires sociales dans les conditions suivantes.

    Les associés ont le droit de consulter au siège social tous les documents établis par la société ou reçus par elle (livres et documents sociaux, contrats, factures, correspondances, procès-verbaux, etc.), et même d’en prendre copie (C. civ. art. 1855 ; Décret 78-704 art. 48). Ce droit ne peut être exercé que par l’associé en personne, à l’exclusion de tout mandataire. Néanmoins, l’associé a la faculté de se faire assister d’un expert agréé par la Cour de cassation ou par une cour d’appel (Décret 78-704 art. 48, al. 3).

    Les copropriétaires indivis de parts sociales ayant la qualité d’associés, ils peuvent obtenir la communication des documents sociaux, leur représentation par un mandataire ne les privant pas de ce droit (Cass. 3e civ. 27-6-2019 n° 18-17.662 FS-PBI : RJDA 10/19 n° 639).

    Le gérant qui ne respecte pas ce droit engage sa responsabilité ; il peut aussi être condamné sous astreinte à le respecter sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile permettant à tout intéressé de se ménager une preuve en prévision d’un procès (CA Paris 19-9-2007 n° 06-15422 : RJDA 2/08 n° 163). Toutefois, un associé ne peut pas invoquer cet article pour demander en justice la saisie de documents sociaux sans avoir auparavant tenté de les consulter et d’en prendre copie au siège social (CA Paris 9-10-2018 n° 17/19171 : RJDA 1/19 n° 30).

    Précisions

    • Un associé peut valablement demander la communication d’une assignation reçue par la société et des pièces de procédure dont celle-ci dispose. En revanche, le secret de l’information pénale exclut le droit pour un associé d’avoir connaissance du rapport d’experts commis dans une instance pénale ouverte sur plainte de la société (TGI Nanterre 15-3-1983 : D. 1983 p. 514 note M. Jeantin).
    • Un associé est fondé à demander la communication de documents concernant une filiale de la société dès lors que cette filiale communiquait nécessairement ses comptes à la société et que les documents demandés étaient donc bien reçus par elle ; cet associé est également fondé à demander la communication de pièces comptables détaillant les créances sur participation figurant au bilan, ces pièces correspondant à la définition très large de l’article 1855 du Code civil qui vise la « communication des livres et des documents sociaux » (CA Paris 14-1-2005 n° 04-13421 : RJDA 6/05 n° 722).
    • Le juge des référés ne peut pas, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile, ordonner à une société de communiquer un document, telle une situation comptable en cours d’exercice, qu’elle ne détient pas (Cass. com. 27-9-2023 n° 21-21.995 F-B : RJDA 1/24 n° 58, à propos d’une société anonyme mais transposable).
    • Jugé, dans un cas où le siège social était « en cours de transfert » et ne pouvait plus se trouver dans les locaux de l’immeuble que la société avait vendu, que le gérant n’était pas fondé à opposer à l’associé la nécessité d’une consultation des documents au siège de la société (CA Paris 19-9-2007 précité). Dans une telle situation, il appartient au dirigeant de pallier l’inaccessibilité du siège social par la mise à disposition des documents dans un lieu proche du siège ou par leur envoi aux associés qui en font la demande pour se mettre à l’abri d’une éventuelle condamnation pour inexécution des obligations qui pèsent sur lui en matière d’information des associés.

    Droit de communication des associés préalable à l’assemblée

    Par analogie avec le régime des sociétés commerciales, les articles 40 et 41 du décret 78-704 prévoient, avant toute assemblée, un droit de communication des associés, qu’ils organisent de la manière suivante.

    Droit de communication préalable à l’assemblée annuelle

    Le gérant doit adresser à chacun des associés 15 jours au moins avant la réunion de l’assemblée annuelle (Décret 78-704 art. 40, al. 2 et 41) :

    • un rapport d’ensemble sur l’activité de la société avec indication des bénéfices réalisés ou prévisibles et des pertes encourues ou prévues ;
    • les rapports de l’organe de surveillance ou des commissaires aux comptes, s’il y a lieu ;
    • le texte des résolutions proposées ;
    • tous autres documents nécessaires à l’information des associés.

    Ces documents – qui peuvent être envoyés aux associés sous pli ordinaire – doivent aussi être tenus à leur disposition au siège social où ils peuvent en prendre connaissance ou copie.

    Précisions

    1. Le décret 78-704 ne précise pas quelle est la nature des « documents nécessaires à l’information des associés ». Sont sûrement visés le bilan et les comptes, mais aussi toutes autres pièces dont les associés doivent avoir connaissance pour pouvoir porter un jugement éclairé sur la gestion du gérant, sur les résultats de l’exercice écoulé et sur les perspectives d’avenir.
    2. Les dispositions ci-dessus ne sont pas applicables lorsque tous les associés sont gérants (Décret 78-704 art. 43).
    3. Compte tenu du droit pour tout associé de participer aux décisions collectives (C. civ. art. 1844, al. 1), l’associé qui ne peut pas voter doit, à notre avis, être destinataire des mêmes documents. Sur le droit pour l’usufruitier de parts sociales d’être destinataire de ces documents, voir n° 62080 s.

    Droit de communication préalable à une assemblée autre que l’assemblée annuelle

    En cas de réunion d’une assemblée autre que l’assemblée annuelle, le texte des résolutions proposées et tout document nécessaire à l’information des associés doivent être tenus à la disposition des associés au siège social où ils peuvent en prendre connaissance ou copie (Décret 78-704 art. 40, al. 2).

    Toutefois, si les associés en ont fait la demande, ces documents doivent leur être adressés soit par lettre simple, soit à leurs frais par lettre recommandée (Décret 78-704 art. 40, al. 3).

    Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque tous les associés sont gérants (Décret 78-704 art. 43).

    Sanctions

    Lorsque les documents auxquels ils ont droit ne sont pas adressés aux associés, l’assemblée peut être annulée (CA Versailles 25-1-2002 n° 00-4715 : RJDA 11/02 n° 1158).

    Toutefois, la nullité des délibérations de l’assemblée en cas de non-respect de l’obligation du gérant de rendre compte de sa gestion ne peut être prononcée que si cette irrégularité a causé un préjudice (Cass. com. 19-4-2005 n° 02-13.599 : RJDA 7/05 n° 833).

    En outre, la nullité s’attache à une absence totale d’information, mais non aux simples irrégularités formelles dès lors que les associés ont, en dépit de ces irrégularités, bénéficié d’une information suffisante (Cass. 1e civ. 31-10-1989 : Bull. civ. I n° 339 ; Cass. com. 19-4-2005 précité). Jugé qu’il en était ainsi dans un cas où tous les documents, sans avoir été adressés par le gérant d’une société civile à chacun des associés, avaient été tenus à leur disposition au siège social (Cass. 1e civ. 31-10-1989 précité).

    Par ailleurs, l’associé qui n’arrive pas à obtenir les documents auxquels il a droit peut demander au président du tribunal, statuant en référé, de contraindre le gérant, le cas échéant sous astreinte, à lui communiquer ces documents, mais à la condition qu’il démontre qu’il n’est pas parvenu à obtenir les documents en cause dans le cadre de son droit à communication légale (CA Orléans 18-7-2006 n° 05-3384 : RJDA 12/06 n° 1239). Une telle demande a été déclarée irrecevable dans un cas où elle avait été formulée directement devant le juge par un associé qui refusait de participer à toute assemblée et n’alléguait même pas avoir été privé de son droit à communication par le gérant (CA Orléans 18-7-2006 précité).

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